mardi 25 avril 2017

Un ver mangeur de plastique pour dépolluer les océans ?

Une bactérie mangeuse de plastique, la solution pour dépolluer les océans ?

Des chercheurs japonais ont découvert une bactérie vorace capable de dégrader des polyesters. Mais les applications potentielles restent encore incertaines.

c'est un fléau qui pollue les sols, les rivières, les océans. Et contre lequel la nature a commencé à se battre via l'évolution d'une bactérie mangeuse de plastique - la première jamais découverte par la science.

Une équipe de chercheurs japonais décrit dans la revue "Science" une espèce de bactérie pouvant briser les liaisons moléculaires d'un des plastiques les plus utilisés dans le monde - le polyéthylène téréphtalate, également connu sous le nom de PET ou polyester, rapporte le "Guardian".

L'équipe de recherche japonaise a passé au crible des centaines d'échantillons de pollution au PET avant de trouver une colonie d'organismes qui utilisent la matière plastique en tant que source d'énergie et de carbone.

Une évolution biologique face à la pollution humaine

Des tests plus poussés ont permis de montrer que ces bactéries ont presque complètement dégradé du plastique de basse qualité en six semaines. Une espèce particulièrement vorace.

"C'est la première étude rigoureuse - elle semble avoir été faite très soigneusement - que j'ai vue qui montre du plastique hydrolysé [décomposé] par des bactéries", témoigne le Dr Tracy Mincer, chercheur au Woods Hole Oceanographic Institution, interrogé par le "Guardian".

Les molécules qui forment le PET sont liées très fortement, et jusqu'à présent, aucun organisme n'était connu comme étant en mesure de le décomposer.

Un examen génétique a permis de révéler que ces bactéries, baptisées Ideonella sakaiensis 201-F6, ont peut-être évolué pour produire des enzymes spécifiquement capables de décomposer le PET, en réponse à l'accumulation de la matière plastique dans l'environnement au cours des 70 dernières années.

Cette évolution rapide a été possible parce que les microbes disposent d'une extraordinaire capacité d'adaptation à leur environnement.

"Je pense que nous voyons combien la nature peut nous surprendre et au final, la capacité de résilience de la nature elle-même", s'enthousiasme Tracy Mincer.

Les bactéries ont cependant mis plus de temps à ronger le PET hautement cristallisé utilisé dans les bouteilles en plastique. Ce qui signifie que les enzymes auraient besoin d'ajustement avant de servir au recyclage industriel ou la dépollution.

Pulvériser la bactérie sur le plastique océanique ?

Les applications potentielles de cette découverte restent encore floues. L'idée qui vient tout de suite à l'esprit des scientifiques est de l'utiliser comme un agent biologique dans la nature. La bactérie pourrait être ainsi pulvérisée sur les tas de détritus qui flottent à la surface des océans, formant de véritables continents. Cette méthode est notamment employée pour lutter contre les déversements d'hydrocarbures.

Mais le PET est trop dense pour flotter sur l'eau. Ideonella sakaiensis 201-F6 n'est donc pas la meilleure candidate. Les chercheurs espèrent cependant trouver d'autres bactéries ayant évolué pour consommer d'autres types de plastiques, car cette découverte suggère que d'autres agents biologiques ont peut-être déjà évolué génétiquement pour faire ce travail et doivent simplement être trouvés à leur tour.

"Je ne serais pas surpris si des échantillons de matières plastiques océaniques contenaient des microbes qui croissent joyeusement sur cette matière et pourraient être isolés de la même manière", espère Enzo Palombo, professeur de microbiologie à l'université de Swinburne.

Mais Tracy Mincer met en garde contre le relâchement d'additifs toxiques lors de l'hydrolyse de la matière plastique présente dans les océans.

Les bactéries pourraient également être utilisées dans les processus de recyclage industriel.

Un tiers de tous les plastiques utilisés par l'homme se retrouvent dans l'environnement et 8 millions de tonnes finissent dans l'océan chaque année, créant de vastes accumulations de détritus qui étouffent la vie.

Le PET représente près d'un sixième de la production de plastique annuel mondiale - soit 311 millions de tonnes. Même si le PET est l'un des plastiques les plus communément recyclés, le Forum économique mondial rapporte que seule un peu plus de la moitié est recueillie pour le recyclage.

Laura Thouny nouvel obs

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